Djè Lou Irié Micheline est coiffeuse à Bériaboukro, une communauté cacaoyère située à une quarantaine de kilomètre du département d’Oumé, dans la région du Gôh en Côte d’Ivoire. Munie de son sac à main contenant ses fournitures scolaires, elle se rend telle une écolière, en ce début de matinée de mardi, à cette séance extraordinaire de cours. Elle est membre de la Cellule Féminine de Renforcement Économique (CFREC) dénommée Kavokiva de cette localité. Il s’agit d’un groupement de femmes qui épargnent et se font des crédits en vue de développer des activités génératrices de revenus. Mais comme Micheline, elles sont nombreuses à être victimes de leur illettrisme. « Quand je coiffe mes clientes et qu’elles me paient, je commets toujours des erreurs quand il s’agit de leur remettre la monnaie. Ce qui fait que je travaille très souvent à perte. Et pendant les périodes de grande affluence comme les fêtes, mon mari est obligé de veiller avec moi pour faire la monnaie pour les clientes. »
Aujourd’hui, cette situation est désormais un vieux souvenir comme en témoigne toujours cette femme courageuse. « Grâce aux cours du soir (d’alphabétisation), même en l’absence de mon mari, je suis à mesure de faire les calculs et la monnaie. Ainsi, je vois mon activité prospérer… »
En effet, Djè Lou Irié fait partie des premiers bénéficiaires du projet d’Alphabétisation mis en place par Nestlé Cocoa Plan en collaboration avec l’International Cocoa Initiative (ICI) en début d’année 2023 au sein de dix 10 communautés dans le but de mettre à la disposition des femmes membres des CFREC, des aptitudes en lecture, en écriture et en calcul. En plus d'aider les femmes dans leurs activités quotidiennes, les compétences acquises pendant ces cours sont conçues pour aider les femmes à gérer leurs activités génératrices de revenus et de les accompagner dans le processus de bancarisation.
A Bériaboukro, l’une des communautés bénéficiaires de ce projet, ce sont au total 45 femmes qui participent à cette première phase du projet ; et à mi-parcours, les résultats sont déjà encourageants. « Avant, quand je partais faire mes achats, ce sont les vendeurs eux même qui faisaient les calculs et je payais ce qu’ils me disaient. Et très souvent, je payais plus qu’il en fallait. Grâce aux cours d’Alphabétisation, aujourd’hui, je peux aller faire mes achats et venir vendre sans me faire gruger. Quand le vendeur fait ses calculs, moi aussi je le fais. » a déclaré Doumbia Kady, vendeuse de produits cosmétiques.
« Ce projet est d’un atout majeur pour les femmes. Elles qui ne savaient ni lire, ni écrire sont aujourd’hui à mesure d’écrire des lettres, à formuler et lire des mots, d’écrire leurs noms et leurs numéros de téléphone. Pour la plupart des femmes, ce projet d’alphabétisation leur permet déjà de mieux mener leurs activités génératrices de revenus. Avec le peu de connaissances assimilées, elles arrivent à suivre pour certaines, les études de leurs enfants et à leur prodiguer des conseils. » nous confie Guy Serges Kokoré, Agent Technique de ICI en charge de la localité.
Grâce au concours du chef de village de Bériaboukro et du directeur de l’école primaire publique, des salles de classe ont été mises à la disposition des femmes pour leur permettre d’apprendre dans un cadre sain et acceptable. Les cours d’alphabétisation se font généralement les vendredi, samedi et dimanche soir de 20h à 22h. Des Agents Techniques veuillent à ce que les cours se passent bien, que les femmes progressent, et aussi témoigner de leur assiduité aux différentes séances.
Des animateurs recrutés et formés
« J’ai obtenu le BEPC en 2007, mais n’ayant pas pu continuer les études, et n’ayant pas d’opportunité d’emploi, j’ai dû me retourner au village pour produire du cacao. Un jour, j’ai été informé du projet d’alphabétisation qui devait se faire ici à Bériaboukro. Le niveau requis étant le BEPC, j’ai alors postulé avec ce diplôme que j’avais. Nous étions trois personnes à compétir pour deux places. C’est ainsi que j’ai été retenu » nous a confié Kouassi N’Guessan Philippe, animateur dans la communauté de Bériaboukro. Comme lui, ils sont au nombre de 12 à avoir été recrutés au sein des communautés bénéficiaires à l’entame du projet d’alphabétisation ; une aubaine pour ces jeunes qui avaient perdu espoir. Ce processus de recrutement a été conduit par les inspections d’enseignement préscolaires et primaires locales. Après leur recrutement, ces animateurs ont été capacités au cours d’un atelier de formation tenu au premier trimestre 2023 à Yamoussoukro sur des notions de pédagogie, d’entretien du cadre de vie et des soins de premier secours. Ils ont pour rôle d’apprendre aux femmes à écrire, à lire et à calculer.
Des femmes équipées et de plus en plus motivées
Pour leur formation, les femmes ont reçu des fournitures scolaires (ardoises, stylos, cahiers), ce qui a davantage suscité un engouement à leur niveau : « Nos mamans ont beaucoup de courage. Malgré leurs travaux champêtres, elles font des efforts pour être au cours, elles sont toujours présentes et cela nous motive », nous a laissé entendre N’Dri Brou Rebecca, la seconde animatrice de Bériaboukro. On peut constater une amélioration chez celles qui ne savaient ni lire, ni écrire au départ. Pour ces femmes, c’est un projet venu à point nommé.
La Fondation ICI dans le cadre de ses actions de remédiation contre le travail des enfants a mis en place des groupements de femmes appelées Cellules Féminines de Renforcement Économique (CFREC) en vue de leur autonomisation afin qu’elles contribuent à leur manière, au bien être de leur familles. Depuis 2020, 300 Cellules Féminines de Renforcement Économique (CFREC) ont été mises en place dans le cadre du projet Nestlé Cocoa Plan VSLA Upscale. Il a permis à de nombreuses femmes d’étendre leurs activités ou d’en réaliser de plus rentables grâce à la bancarisation.