La Fondation International Cocoa Initiative a analysé les éléments de l'impact des changements dans les revenus des ménages sur le travail des enfants, avec le soutien de la Plate-forme suisse pour un cacao durable. L'analyse de 50 études montre une relation complexe : alors que la diminution du revenu des ménages tend à accroître le travail des enfants, l'augmentation du revenu des ménages peut entraîner une augmentation du travail des enfants, ainsi qu'une diminution de celui-ci. Alors qu'une crise économique mondiale sévit en raison de la pandémie actuelle de Covid-19, ces résultats mettent en évidence les dangers potentiels pour la protection des enfants dans les communautés productrices de cacao.
À ICI, nous pensons que les agriculteurs doivent gagner leur vie de manière décente. Avec nos partenaires, nous cherchons à lutter contre la pauvreté dans les communautés productrices de cacao, en promouvant des approches efficaces et durables pour y parvenir. Nous sommes également conscients que toutes les activités peuvent avoir des conséquences involontaires, y compris sur les droits des enfants.
C'est pourquoi, en collaboration avec le groupe de travail sur le revenu de subsistance et le travail des enfants de la Plateforme Cacao Suisse, ICI a procédé à un examen des données disponibles sur la manière dont les changements de revenu des ménages affectent le travail des enfants. Nous avons étudié l'impact des chocs inattendus qui ont augmenté ou diminué les revenus, ainsi que les effets des politiques et des programmes visant à augmenter les revenus des ménages.
Les éléments de cette étude montrent que l'augmentation des revenus ne constitue pas à elle seule une solution miracle pour résoudre le problème du travail des enfants Si la réduction de la pauvreté est un élément clé de la solution, il est crucial que nous utilisions les données sur les différents impacts des changements de revenus sur le travail des enfants, pour éviter les effets négatifs. Ce n'est qu'en concevant avec soin et en évaluant avec rigueur les politiques et les interventions visant à augmenter les revenus des producteurs, que nous pourrons faire en sorte qu'elles soutiennent également la réduction du travail dangereux des enfants.
Entre chocs négatifs et positifs
La relation entre le revenu et le travail des enfants est complexe. Les chocs négatifs subis par les revenus des producteurs, causés par de mauvaises récoltes, une chute des prix ou une période de mauvais temps dévastatrice, entraînent généralement une augmentation du travail des enfants. Ces chocs négatifs mettent davantage à contribution les familles d'agriculteurs qui, disposant de ressources limitées ou de sources de travail périodiques, font souvent appel à leurs enfants pour combler le vide.
Ces résultats suggèrent que les efforts visant à renforcer la résilience des ménages agricoles face à de tels chocs pourraient aider les familles à trouver d'autres moyens de faire face aux périodes difficiles.
En réponse à des chocs positifs, tels que l'augmentation du prix des récoltes ou l'augmentation des précipitations entraînant une récolte plus importante, les effets ont été mitigés. Dans la moitié des cas environ, ces chocs positifs ont entraîné une augmentation du travail des enfants. Ces résultats suggèrent que chaque fois que la valeur de l'activité agricole augmente, il y a un risque potentiel que le travail des enfants augmente également.
Politiques visant à augmenter les revenus : quelques exemples prometteurs dans un contexte peu probant
Les interventions visant à augmenter les revenus des ménages, telles que les transferts d'argent liquide, l'aide en nature et la micro-finance, ont également eu des effets mitigés sur le travail des enfants.
Les transferts d'argent liquide se sont généralement avérés efficaces pour réduire le travail des enfants, en particulier le travail rémunéré.
Cependant, certaines études ont montré que les transferts d'argent liquide augmentaient le travail des enfants dans les plantations familiales, dans les coopératives familiales et dans les tâches ménagères. La prochaine étude de ICI sur les transferts d'argent liquide et le travail des enfants examinera cette relation plus en détail.
Les subventions scolaires, la construction d'écoles et les incitations directes à la scolarisation des élèves se sont révélées efficaces pour accroître la fréquentation scolaire, mais moins pour réduire le travail des enfants. Ces résultats soulignent que le travail et la scolarisation ne s'excluent pas mutuellement - de nombreux enfants continuent de travailler en parallèle de leurs études. En effet, les revenus tirés du travail peuvent les aider à rester à l'école.
Les programmes de microcrédit ou d'assurance maladie ne semblent pas être les interventions les plus efficaces pour réduire le travail des enfants, mais ils n'ont pas non plus entraîné une augmentation du travail des enfants. Les données disponibles sur ce type d'intervention sont limitées, ce qui rend difficile de tirer des conclusions définitives.
Quelle que soit l'intervention, certains enfants en bénéficient plus que d'autres
"Les études couvertes dans cette revue montrent que l'augmentation des revenus affecte les enfants différemment, en fonction de nombreux facteurs, tels que l'âge et le sexe" explique Megan Passey, responsable du département "Connaissance et apprentissage" de ICI. "On a constaté, par exemple, que les filles, dans de multiples contextes, bénéficient moins des changements positifs de revenus et souffrent davantage lors des chocs négatifs de revenus".
Les caractéristiques du ménage et de la famille ont également leur importance. L'alphabétisation des parents, la taille de la famille et l'accès au crédit sont autant d'éléments qui influent sur la probabilité qu'un ménage ait recours au travail des enfants au départ, ainsi que sur la façon dont il réagit lorsque les revenus changent. Au niveau de la communauté, l'accès au travail des adultes, les filets de sécurité sociale et les facteurs culturels jouent également un rôle.
Lire "Les effets de l'évolution des revenus sur le travail des enfants" en anglais.