Yao Kouakou Serge Maurice est un jeune garçon de 15 ans qui vit et est scolarisé à Zou (à près de 102 km de Duékoué, en Côte d’Ivoire). Durant les vacances, il rejoint sa famille à Belleville, une communauté cacaoyère située à près de 82 km de piste de Duékoué. Depuis l’an dernier, il est loin de s’ennuyer durant les périodes de congés ou de vacances scolaires. En effet, tous les matins, après avoir pris sa douche, il se rend au Centre Ami des Enfants (CAE), un espace construit par la fondation ICI avec l’appui de Jacobs Foundation, pour éloigner les enfants des travaux dangereux dans les champs, leur permettre de mieux s’exprimer et renforcer leurs capacités.
Il s’agit d’un projet novateur pour les communautés cacaoyères de Côte d’Ivoire. Ce centre est un espace dédié à l’épanouissement et au bien-être de l’enfant. Il peut jouer en toute quiétude, tout en apprenant différentes compétences. « Avant l’ouverture du centre, je ne saluais pas les jeunes du village. Aujourd’hui, ce n’est plus le cas. Au centre, je fais un avec mes amis. Je m’entends bien avec eux et on se salue désormais quand on se voit en dehors du centre », Maurice nous a confié. Un fait confirmé par M. Zokdoua Dohoun Narcisse, chef de village de Biakou (Communauté cacaoyère située à 45 km de Gagnoa) qui dispose également d’un CAE. Il affirme qu’ « Avec ce centre, on note une cohésion dans le village ». Maurice aime la lecture, il aime les belles histoires retracées en images. Il vient au centre avec ses sœurs, les jours d’ouverture, toujours impatient : « Quand je me réveille les matins, je me lave et je pars au centre. Quand le centre n’est pas ouvert, je me rends chez un des animateurs pour l’attendre », a-t-il dit tout heureux.
Organisation pratique des CAE
Au centre, les enfants dont l’âge varie entre 5 et 17 ans disposent d’une multiplicité de jeux tels que le Monopoly, l’Awalé, le Babyfoot, l’harmonica, la flute, la corde à sauter, de ballons de football, de basket-ball ainsi que de nombreux livres. En dehors de ces jeux, les enfants bénéficient de sensibilisations portant sur leurs droits et devoirs et reçoivent aussi des conseils avisés de la part des animateurs qui les encadrent. « Les encadreurs nous demandent de respecter les parents, d’étudier, de saluer les personnes que nous rencontrons. Je connais mes droits, mais aussi mes devoirs », a laissé entendre Dohoun Ozoua Nahomie, une jeune fille de 11 ans en classe de CM2 et qui fréquente le CAE de Biakou.
Pour cette phase pilote, le projet CAE est mis en œuvre dans 3 communautés que sont Téady, Belle-ville et Biakou. Il a enregistré à ce jour plus de 500 enfants dont 400 viennent régulièrement au centre. Durant l’année scolaire, les CAE sont ouverts les jours de repos des enfants à savoir les mercredis, samedis et dimanches. Pendant les vacances, ils sont ouverts au quotidien. Ces centres sont supervisés par des animateurs formés pour la circonstance, qui sont au nombre de 2 par centre.
L’engouement des parents en raison de l’apport éducatif et sécuritaire des CAE
L’avènement du CAE dans les 3 communautés a fortement impacté les habitudes des parents. « Avant que le centre soit créé, les enfants allaient au champ avec leurs parents. Mais depuis que le centre est là, les parents s’y rendent seuls sans soucis, parce que leurs enfants sont encadrés au centre. Il y a des femmes dont les enfants se trouvent à Guiglo, sans surveillance réelle, qui souhaitent les ramener au village ici. De plus, les enfants sont à l’abri des morsures de serpents », a affirmé M. Kpahou Landry, le chef de village de Téady, canton de Zarabaon.
La fréquentation du centre par les enfants permet aux parents de vaquer à leurs occupations sans être inquiets de savoir où ils se trouvent. C’est le cas de Touré Fanta, épouse d’un producteur de cacao et mère d’Awa Aba, une jeune fille de 12 ans qui fréquente le CAE de Téady. « Avant l’existence du centre, les enfants se promenaient dans le village. Je préférais donc partir au champ avec eux. Aujourd’hui, ils vont au centre et moi, je pars tranquillement au champ ».
Contrairement aux années antérieures, comme l’a affirmé Joseph Konan Kouamé, Agent Technique ICI à Bangolo, la présence du centre a permis de maintenir de nombreux enfants dans le village lors des périodes de vacances. Il épargne également aux parents les difficultés financières pour occuper sainement les enfants, surtout à la Noël : « Depuis l’installation des centres, de nombreux enfants préfèrent rester sur place plutôt que d’aller en vacances ailleurs. Avec le CAE, la sécurité des enfants est assurée et il est équipé de jeux éducatifs et sportifs », a t-il dit.
Un autre fait majeur noté par les parents : Les enfants arrivent à s’exprimer aisément et à échanger entre eux. Le CAE a permis à de nombreux enfants de sortir de leur timidité et d’aimer la lecture. Il a leur a permis également de découvrir de nombreux jeux qu’ils ne connaissaient pas, tout comme leurs parents. C’est le cas de Traoré Nachofolo Evrard, âgé de 12 ans et élève en classe de 4ème. En vacances chez ses parents à Téady, il a déclaré ceci : « Le centre m’a permis d’apprendre des jeux auxquels je n’avais jamais joué auparavant, tels que les puzzles et le Monopoly. Avec le Monopoly par exemple, j’ai appris à bien calculer ».