Tobly Bangolo1, une communauté cacaoyère située à 15 km de Duékoué. A la rentrée de l’année scolaire 2021-2022, des élèves issus de classes passerelles (des classes organisées pour aider les enfants déscolarisés à rattraper leur retards et reprendre l’école) ont tous intégré l’école formelle. Pour les soutenir dans cette étape, les enfants ont reçu des kits composés chacun d’un sac, d’un cahier de suivi (en fonction du niveau d’étude de l’élève), d’une boîte de craie, d’un lot de 6 cahiers, de protège-cahiers, d’un compas, d’une ardoise, de stylos et d’un paquet de crayons de couleurs.
Une action rendue possible grâce à l’appui du programme TRECC (Transforming Education in Cocoa Communities) et Nestlé, en partenariat avec la Direction de l’Alphabétisation, de l’Education non Formelle (DAENF) du ministère de l’Education nationale et de l’Alphabétisation.
Kaboré Aïssa, une jeune fille de 13 ans accompagnée de son grand frère, planteur de cacao, nous raconte son histoire. Élève en classe passerelle en 2020, elle est désormais inscrite en classe de CM1 à l’Epp Tobly Bangolo1. Elle débute son récit sur son envie d’aller à l’école, comme l’amie à sa grande sœur qui venait la voir bien habillée dans sa belle robe d’école : « Avant, ma grande sœur avait une amie qui allait à l’école. Elle venait souvent voir ma sœur en uniforme scolaire et cela me plaisait ».
Faute de moyens financiers, Aïssa, tout comme sa grande sœur, n’allaient pas à l’école. Puis, un jour, l’opportunité lui a été donnée de s’inscrire dans une classe passerelle. Le but principal des ces classes est d’aider les enfants non scolarisés ou déscolarisés précoces, rattraper le niveau scolaire des autres élèves, afin de reprendre l’école formelle. Depuis 2016, la Fondation ICI, en collaboration avec TRECC (Transforming Education in Cocoa Communities) de Jacobs Foundation et Nestlé, a initié des projets de classes passerelles dans le cadre des actions de remédiation au travail des enfants dans les communautés productrices de cacao. « J’étais à la maison, on nous a dit de venir à l’école (NDLR : classe passerelle). A l’école, on nous a appris à lire, à écrire et à compter. Ça me plaît de lire et écrire parce que c’est bon », a-t-elle déclaré. Des propos soutenus par son frère Kaboré Wazi, planteur de café et cacao, qui n’a jamais été scolarisé. « Elle était à la maison. Elle accompagnait sa maman au champ et un jour, on a entendu parler de l’école. Je suis aujourd’hui content car je ne suis pas allé à l’école. Aujourd’hui, ma petite sœur sait lire et écrire. Quand on lui donne papier (des documents administratifs ou lettres), elle lit ce qui est écrit », nous a-t-il dit.
C’est ainsi qu’a été adopté au contexte des classes passerelles, le Programme d’Enseignement Ciblé (PEC), une approche de remédiation conçue par l’ONG indienne Pratham, pour améliorer les acquis scolaires en lecture et mathématiques). Cette approche organise les enfants en groupes en fonction de leur niveau d'apprentissage plutôt que de leur âge et vise à aider les enfants à développer des compétences de base en lecture et en mathématiques.
La satisfaction des parents
A Kouadiokro 2, une communauté cacaoyère située à 16 km de Duékoué, les parents nous ont raconté les bienfaits des classes passerelles pour les enfants considérés comme étant en retard, en raison de leur âge avancé, allant de 9 à 15 ans. « A Kouadiokro 2 ici, la classe passerelle s’est bien déroulée. Il m’arrivait parfois de venir à l’école pour voir ce qu’ils faisaient », nous a dit Konan Koffi Mathieu, producteur de cacao et père d’un enfant bénéficiaire, visiblement heureux de voir sa fille recevoir un kit scolaire. Cela, en raison de la réduction des frais à dépenser dans le cadre de la scolarisation de sa fille : « Tout ce que je devais payer a été réglé par ICI et TRECC. Il y a des cahiers, le livre de suivi et beaucoup d’autres choses dans le sac », a-t-il affirmé.
Mathieu accompagné de son épouse nous a expliqué les raisons pour lesquelles sa fille n’a pas été inscrite très tôt à l’école formelle. « J’ai eu un accident à la main, au champ. Le jeune homme avec qui j’y étais m’a coupé la main par accident. Je ne pouvais donc plus travailler. Ma femme a dû envoyer notre fille chez sa mère, qui partait au champ avec elle », nous a-t-il confié. Poursuivant, il a fait savoir : « Vu le manque de moyens chez sa grand-mère, je l’ai ramené auprès de nous à Kouadiokro 2. C’est ainsi qu’on nous a parlé de l’école passerelle qui allait débuter. Un agent ICI nous a dit que l’école est obligatoire pour les enfants de 6 à 16 ans (Directive gouvernementale). C’est comme ainsi que nous l’avons inscrite ». Et aujourd’hui, il ne regrette pas, il se dit fier de sa fille OulaÏ Tiphaine qui est devenue moins timide, qui « sait lire et écrire ».
Ce sentiment de fierté et de reconnaissance est partagé par de nombreux parents qui souhaitent voir leur enfant bénéficier d’une bonne éducation. C’est le cas de Koné N’Tchingin Moïse, un planteur de cacao rencontré à Kouadiokro 2 : « Je venais voir souvent ce que le maitre leur enseignait et ce que je voyais me plaisait beaucoup. J’étais très content surtout de voir mon fils étudier à la maison. Il est le dernier enfant de la famille et il a été le seul à ne pas être scolarisé faute de moyens financiers. Vous savez, le fait que je ne sois pas allé à l’école m’a fait du mal (NDLR : peiné). Je ne veux donc pas que mon fils soit comme moi. Mon enfant a la majorité des fournitures dans le sac qu’il a reçu de la fondation ICI et TRECC et j’en suis content ». Nous a-t-il dit heureux surtout de ne plus voir son fils aller au champ avec sa femme Marie-Noëlle Koné.
Au cours de l’année scolaire 2020/2021, 429 enfants ont bénéficié de cette approche dans 16 classes passerelles reparties dans 15 communautés SSRTE NESTLE. Sur les 429 enfants, 419 enfants ont obtenu la moyenne requise pour intégrer le circuit formel et ont été répartis par la DAENF à divers niveaux dans les classes formelles selon leur performance. Les enfants ont donc bénéficié d’un kit scolaire chacun pour faciliter leur intégration au système formel.
Le programme TRECC a été lancé par la Jacob's Foundation, et réuni de nombreuses parties prenantes, dont le gouvernement, l'industrie du cacao et du chocolat, des ONG, des chercheurs et autres, pour améliorer l'accès à une éducation de qualité. ICI est un partenaire technique du programme TRECC et a contribué à sa mise en œuvre, avec plusieurs membres. Plus d'informations peuvent être trouvées dans le rapport TRECC récemment publié.